Les alsaciens privés de Cognac

En Alsace on distillait tout .. ou presque

C’est un courrier daté de mai 1945, soit quelques mois à peine après la libération de Mulhouse en novembre 1944 (1), qui nous a mis sur la piste du goût du Cognac par les alsaciens. Terre de vignobles et d’alambics, l’Alsace était réputée pour ses Schnaps à base des fruits locaux (cerises « Kirsch« , poires, prunes et quetsches, mirabelles …) mais aussi de petits fruits et de plantes (alisiers, sureaux, framboises, gentianes, bouillons blancs …). D’ailleurs chaque propriétaire ou locataire de verger avait un droit annuel de distillation hors taxes, d’une vingtaine de litres de Schnaps (2) . Mais dans les campagnes on distillait souvent la nuit et on ne rendait le célèbre col de cygne (3) que le lendemain matin aux agents des Contributions. Et dans les hameaux de la montagne vosgienne, une fois l’hiver venu et que la hauteur neige empêchait tout déplacement des agents des Contributions ou des Douanes, la distillation allait bon train …

Cygne
Alambic ambulant avec son col de cygne en place

Un distillateur Mulhousien

Ganter3

Marcel GANTER avait installé son commerce à Dornach, commune rattachée à Mulhouse en 1914. Il y vendait ses liqueurs et produits de distillation et revendait d’autres alcools et vins fins.

Ganter4

Son commerce se trouvait entre la rue des Vignes et la rue Zu Rhein, mais cette dernière, transformée en 4 voies, a bien changée. Toutefois il semblerait que le 7 rue des Vignes est identique à ce qu’il devait être en 1914.

D§s 1924 Marcel GANTER avait acquit ce commerce « Grande Distillerie Centrale de Ch.HELMINGER », suivant le Journal Officiel du 16 avril 1924 (merci à ma sieur Françoise pour cette information), entreprise qui s’appellera désormais « Grande Distillerie Centrale de Ch.HELMINGER, successeur Marcel Ganter ».

Rue des Vignes

Pendant l’occupation allemande, la distillerie Brantweinbrennerei et la fabrique de liqueurs et sirops Likör und Sirupfabrik a continué de fonctionner et de commercer au même endroit, comme nous le confirme un courrier de l’époque, timbré du tristement célèbre Adolf  !

1940

Une commande de Cognac

Après la libération de Mulhouse, Marcel GANTER préviendra un fournisseur de Cognac, la Maison FOUCAULT, qu’il avait pris la qualité de producteur.

1945

Il venait de contacter cette Maison quelques semaines auparavant pour son négoce, mais sa demande était restée sans réponse. Mi-mai il réitèra sa demande, précisant que sa nombreuse clientèle alsacienne avait été privée dece précieux breuvage (du fait de la guerre).

Ganter5

Il donna des précisions quant au stock de bouteilles vides dont il disposait à Cognac et quant aux modalités de transport.

Ganter6

La Maison FOUCAULT, fondée à Cognac en 1847 par Lucien FONCAULT, est toujours une Maison réputée pour ses VS, VSOP et XO. Voir ici son historique et sa publicité en pdf ===>>>

 

 

La fabrication de liqueurs  d’Alsace

GanterDistil

Distillateur de fruits, Marcel GANTER commercialisait sa production sous son nom. Les anciennes bouteilles d’eau de vie de la Maison GANTER font aujourd’hui le délice des collectionneurs. Il semblerait que la Maison LAUGEL à Marlenheim (Bas-Rhin) ai, dans les années 80, commercialisé des alcools provenant de (l’ancienne ?) distillerie Ganter.

 

Ganter.1956

(1) Mulhouse, comme toute l’Alsace, est annexée au troisième Reich de 1940 à 1944. « Dans la soirée du 20 novembre 1944, les blindés de la 1re Division Blindée du général Jean Touzet du Vigier, précédés par le Combat Command 3 du colonel Jean-Charles Caldairou, entrèrent dans la ville qui fut définitivement libérée le 24 novembre et revint à la France. »  Voir Wikipédia ici===>>>

(2) Ce droit n’est plus transmissible et va donc s’éteindre avec les derniers bouilleurs de cru. J’ai pour ma part été formé au cérémonial, très méticuleux, de la distillation par mon beau-père dans les années 1970. Son verger produisait des centaines de kilos de fruits, dont les meilleurs finissaient dans les tonneaux en bois où ils fermentaient durant une année ou deux. Voir un intéressant article de Freddy SARG sur le sujet, en pdf ici ===>>>

(3) Le col de cygne était la pièce indispensable, en cuivre, qui reliait le chaudron où on cuisait le mou, et la partie réfrigérante d’où sortait le précieux liquide. On ne l’obtenait qu’à une heure précise et pour un temps déterminer, en fonction de sa déclaration préalable. Quand l’interdiction de distiller en continu (et la nuit) intervint, les bouilleurs, avaient trouver la parade en préchauffant le mou, afin que, dès la mise en place du col de cygne, le précieux liquide se mette à couler. Le col était rendu à la dernière minute, encore tout chaud ! (expérience vécue).

Et voici le document complet :

Ganter1

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